Promenade autour de Saint-Martin :
Les truffes vendues à la foire de lavercantière le 13 décembre 1905 provenaient surtout de Saint-Martin.
Mr Mayssonnier de SOUILLAC a publié en 2010 un livre sur l’histoire du commerce de truffes tenu par sa famille pendant quatre générations. Il a pour cela étudié une masse importante d’archives. C’est en consultant ces documents qu’il a trouvé un télégramme et une lettre tous deux datés du 13 décembre 1905 qui concernent la foire de Lavercantière de ce jour-là.
Voici le texte de la lettre-compte rendu qu’a reçu à l’époque Monsieur CHAMBON (Prédécesseur de Mr MAYSSONNIER) de Monsieur BLADIER, acheteur pour le compte de l’entreprise.

Cette lettre est très explicite voilà comment elle était rédigée.
Saint Martial le 13 Décembre 1905,
Monsieur CHAMBON,
Comme je vous l’annonçais dans ma dépêche de Dégagnac, il y avait à Lavercantière environ 1250 Kilos de truffes. En ont acheté
Couderc - 250 kg
Cubayne - 150 kg
Henras - 150 kg
Léon Izac - 100 kg
Lalbert - 150 kg
Joubès - 100 kg
etc…etc.La truffe me paraissait belle aussi j’ai cru bien faire de prendre ma bonne part (218 kg).
Je puis me faire illusion mais il me semble qu’elle vaut celle de Cressensac. Demain à Gourdon, il y aura peu de marchandise, ça vaudra largement 10 francs et la truffe sera inférieure, je crois faire peu, à moins que les bons caveurs de l’Abbaye y viennent.
La truffe d’aujourd’hui coûte 2410 francs et les foies 160 francs.
Les truffes de Marminiac achetées par Jouclard 795 francs et les foies 497 francs ont été réglés comme je vous l’ai dit et je dois vous devoir à ce jour 3453 francs. Vous voudrez bien me dire si nous sommes d’accords.
S’il y avait quelque chose de nouveau pour Bach vous voudriez bien m’écrire Hôtel Combelles à Cahors ou bien à Bouyssi.
J’expédirai par l’express demain truffes et foies.
Je maudis un peu votre dépêche qui m’obligera à partir demain matin à 5 heures pour acheter quelques misérables foies.
Veuillez agréer mes sincères salutations.
(Signature) BLADIER.

Le télégramme daté lui aussi du 13 décembre a été expédié de Dégagnac. Il est indiqué sans commentaires 1250 10 à12 acheté 218 extra 2410 foies 160.
Ce qui veut dire qu’il y avait 1250 kilos de truffes valant de 10 à 12 francs le kilo et qu’il en avait acheté 218 kilos qualifiée d’extra, pour le prix global de 2410 francs. Pour les foies il en avait acheté pour 160 francs.
La lecture de ces deux documents permet de nous rendre compte que la truffe qu’on trouvait à la foire du 13 décembre de Lavercantière était excellente puisqu’elle était comparée à celle de Cressensac qui était réputée.
On n’insistera pas sur le fait que la truffe de Gourdon est inférieure et qu’il y en a peu, exceptée celle de l’Abbaye apportée par « de bons caveurs ».
Aujourd’hui les quantités annoncées par Mr BLADIER nous laissent rêveurs. Il semblerait que l’acheteur BLADIER soit peu intéressé par les foies. Il n’en a acheté que pour 160 francs à Lavercantière, alors qu’un (sous) acheteur, qui lui rend des comptes, Monsieur JOUCLARD, en a acheté pour 497 francs à Marminiac, par ailleurs la lettre se termine par l’expression d’un mécontentement au sujet des foies, celui d’être obligé de partir le lendemain matin « à 5 heures pour acheter quelques misérables foies ».


Par contre il prépare sérieusement la foire de BACH, certainement pour acheter d’autres truffes.
Enfin il est précisé que, truffes et foies, seront expédiés par l’express, c'est-à-dire par le train, de GOURDON à SOUILLAC, car l’express ne s’arrête pas à DEGAGNAC.
Nos gares à cette époque et jusques dans les années 60 - 70, embaumaient très fortement la truffe tout l’hiver. Quand vous le dites aujourd’hui, certains ne veulent pas vous croire et vous prennent pour un affabulateur.
En nous transmettant ces documents Mr et Mme MAYSSONNIER ont montré combien ils aimaient leur métier et en étaient passionnés, comme le sont beaucoup de commerçants et d’artisans.
Ils nous ont permis d’avoir une idée précise et très précieuse de la vente des truffes chez nous au début du 20ième siècle. Nous aurions été bien incapables de parler de quantité et de prix à cette époque car ces éléments ne se sont pas transmis et il est difficile de l’imaginer aujourd’hui quand on voit la disparition quasi-totale des récoltes de truffes chez nous.
Ce ne sont pas les faibles quantités qui se vendent ces dernières années sur les marchés de Gourdon ou Lalbenque qui auraient pu nous informer davantage.
On peut voir sur internet qu’à Lalbenque, marché nationalement connu, qui fait l’objet de reportages aux journaux télévisés, le 8 décembre 2010, il ne s’est vendu que 60 kg de truffe à 500 € le kilo (soit 327 978,50 francs le kilo en francs de 1905, montant dans lequel il y a beaucoup d’augmentation du prix de la truffe et beaucoup de dévaluation de la monnaie, mais cela est une autre histoire), il ne s’en était vendu que 30 kilos le 2 décembre 2009 et cela attire les foules.


Les 1.250 kilos de truffes vendus en 1905 à Lavercantière seraient restés inconnus si Mr et Mme MAYSSONNIER ne nous avaient pas donné leurs documents.